De plus en plus fiable, la transplantation pulmonaire semble désormais réhabilitée en France, après y avoir été victime d'un long discrédit
Partout dans le monde, la greffe du poumon est une solution couramment proposée aux malades qui ne peuvent plus respirer sans l'aide permanente d'un appareil à oxygène. Partout, sauf en France. Dans l'Hexagone, cette opération traîne depuis quinze ans une mauvaise réputation injustifiée. La Journée nationale de réflexion sur le don d'organes et la greffe (1), le 22 juin, est l'occasion de la réhabiliter. La transplantation engendrerait, dit-on, beaucoup de complications. Elle provoquerait trop de décès. L'image est à ce point négative que le nombre d'opérations est tombé au plus bas en 2003, avec seulement 92 interventions réalisées. A population égale, c'est entre deux et quatre fois moins que dans les autres pays occidentaux! Cette année-là, les spécialistes de la technique ont touché le fond. Et décidé, in extremis, de s'attaquer aux idées reçues.
Il s'agissait, d'abord, de rétablir la vérité des faits. «Les résultats des greffes du poumon sont aussi bons que ceux obtenus pour le cœur», martèle le Dr Marc Stern, pneumologue à l'hôpital Foch, à Suresnes (Hauts-de-Seine). En effet, le taux de survie à un an atteint maintenant 70%. L'opération reste très lourde, mais la majorité des patients n'ont plus besoin de machine pour respirer à leur sortie du bloc. Ils peuvent désormais quitter l'hôpital au bout de trois semaines seulement. Tous ces progrès ont été suivis de près par les pédiatres qui traitent la mucoviscidose, maladie génétique qui se traduit par l'obstruction des poumons. Mais l'information avait peu circulé, jusque-là, en dehors de ce milieu très spécialisé.
Or l'opération peut aussi sauver des vies chez les adultes atteints d'emphysème, une maladie provoquée, dans la majorité des cas, par le tabac. Un groupe de travail, réuni par l'Agence de la biomédecine (ex-Etablissement français des greffes), s'est donc mobilisé pour le faire savoir aux différents médecins qui interviennent tout au long de la chaîne de transplantation. D'abord, les pneumologues susceptibles de recommander l'opération à leurs malades. Ensuite, les réanimateurs chargés du prélèvement des organes sur les personnes en état de mort cérébrale. Enfin, les chirurgiens thoraciques amenés à pratiquer la greffe.
Un an après, les efforts ont payé. Le résultat est même spectaculaire, puisque le nombre de greffes du poumon a pratiquement doublé en 2004, avec 167 opérations réalisées. La technique n'est plus discréditée. Reste à conforter le changement des mentalités.