BPCO victime du tabagisme familial, Betty Moureaux a sombré tôt dans la maladieDans la famille Moureaux, le tabagisme est une longue tradition familiale. C’est à l’âge de 16 ans que Betty fumera sa première cigarette. Une addiction qui l’accompagnera jusqu’à l’âge de 44 ans, époque à laquelle on fume encore dans les bureaux, y compris des établissements de santé, comme ceux de la maternité où elle travaille encore. Elle ira jusqu’à fumer 3 paquets par jour, si elle se couche de bonne heure. Davantage si la soirée se poursuit entre amis. La cinquantaine passée, Betty, fait bronchite sur bronchite. De plus en plus essoufflée, elle peine à grimper des escaliers. Elle consulte son médecin traitant qui l’adresse à un pneumologue. Ce dernier diagnostique de l’emphysème et une BPCO. Il lui faut réagir et se reprendre en main. Le pneumologue veut l’envoyer en cure dans les Pyrénées. Elle refuse, mais ira au CHU de Nancy où elle s’engage dans un programme de réentraînement à l’effort, fait du vélo, réapprend la marche rapide, à son rythme, se remet à faire son ménage. Elle reprend confiance et espoir, convaincue que rien de la condamne à l’immobilisme. Elle n’est pas sous oxygène, mais en connaît les inconvénients. Aussi s’engage-t-elle à sensibiliser son entourage sur la BPCO et ses ravages. Sa famille d’abord, dont une sœur, sous oxygène 14 heures par jour qui continue de fumer, une autre sœur, un frère et un fils également accrocs de la cigarette. Elle en parle autour d’elle, au bureau, aux jeunes qui fument. « Il n’est pas évident de sensibiliser les gens », confie celle qui a rejoint l’association lorraine des insuffisants respiratoires (ALIRAS) et a témoigné sur la maladie dans un film réalisé par l’Union régionale des caisses d’assurance-maladie de Lorraine. « L’insuffisance respiratoire est quelque chose d’épouvantable » ajoute Betty, qui depuis quelques mois s’adonne à la marche à pied avec les membres de son association. « Nous avons avec nous des marcheurs équipés de portables à oxygène qui n’acceptent de randonner qu’à l’extérieur de leur commune » explique-t-elle encore. Car l’ostracisme à l’égard des malades BPCO existe bel et bien ! « Le simple fait de cracher suite à une crise bronchitique est mal accepté » constate celle qui a commencé sa vie par des bronchites à répétition et qui se dit qu’elle n’aurait jamais du commencer à fumer !
Gisèle, ancienne buralisteAncienne buraliste, puis employée de
, Gisèle Cormier est atteinte de BPCO depuis 1991. Si elle a fumé plus de 20 ans, elle a aussi été victime d’un tabagisme passif qui a marqué son quotidien. Giséle est, à 58 ans, une victime du tabagisme passif. Elle a subi ce dernier pendant plus d’une décennie, en vendant des cigarettes au bureau de tabac qu’elle tenait en région parisienne aux côtés de son époux Lucien jusqu’en 1992, puis au sein d’un
que les époux achèteront par la suite dans la région nantaise où ils résident désormais . De plus Gisèle fumera jusqu’à l’âge de 42 ans, date à laquelle son médecin traitant détecte une BPCO, associée à de l’emphysème, cette maladie des alvéoles pulmonaires qui lui rendra sa respiration de plus en plus difficile et son quotidien au milieu des fumeurs particulièrement pénible. Après de multiples examens d’exploration respiratoire menés à l’hôpital, on lui annonce qu’elle ne pourra plus, à l’avenir, vivre sans l’aide d’une bouteille à oxygène. L’état de ses poumons est trop dégradé. De colère, Gisèle jette son dernier paquet de cigarettes en reprenant sa voiture, mais refusera d’être «branchée», 18 heures par jour, à une machine. Cinq années durant, elle luttera, en vain, contre l’acceptation d’une maladie respiratoire pourtant irréversible. Ses bronches sont trop atteintes. Les différents traitements qu’elle prendra n’y feront rien. En 1996, Gisèle retombe malade. Son état s’est sérieusement empiré. Après une dernière décompensation, elle se résout à accepter la machine à oxygène qui, depuis, ne la quitte plus, où qu’elle soit. Aujourd’hui elle va mieux, vit une vie presque « normale » et se déplace régulièrement en voiture, avec son époux et sa bonbonne d’oxygène, pour aller rendre visite à ses enfants en région parisienne ou à l’Est. «La BPCO est une maladie insidieuse, qui ne se voit pas, qui ne se reconnaît pas », dit celle qui est venue témoigner de son état de santé aux Etats Généraux de la BPCO (voir rubrique sur ce site). Ancienne buraliste, elle souligne volontiers que la fumée n’épargne aucunement ceux qui font commerce du tabac sur leurs lieux de vente. Loin de là !
Désormais Gisèle se déplace avec l’aide de son déambulateur, sur lequel elle place sa bouteille d’oxygène portable qui lui donne l’autonomie nécessaire à ses déplacements. Loin de baisser les bras et de s’enfermer dans sa maladie, elle milite dans une association locale d’insuffisants respiratoires (AIR 44) pour une meilleure prise en charge de la BPCO. « Il y a encore beaucoup à faire pour faciliter la réhabilitation respiratoire dans les rangs des malades », dit aussi la militante qu’elle est devenue. Pas résignée pour un sou.
Yolande ou la journée ordinaire d’une insuffisante respiratoire« Peut-on imaginer en nous voyant assis à la terrasse d’un
, un bouquin à la main ou marcher en ville en faisant du lèche-vitrine, que notre vie quotidienne est un parcours du combattant ?
C’est pour cela que j’ai choisi de vous parler de ces journées, bien disciplinées, de l’insuffisant respiratoire, vivant seul, qui doit faire des efforts extrêmes pour accomplir les gestes de la vie quotidienne.
Je suis moi-même insuffisante respiratoire et j’ai appris à organiser méthodiquement mes journées, pour économiser mon souffle.
Quel que soit son état de santé, les impératifs de l’intendance d’une maison, ne diffèrent pas. Tout doit être fait malgré tout, le ménage, les courses, la vie sociale, sans oublier les soins que l’on apporte à sa propre personne.
D’ailleurs, je vais commencer par ce dernier point.
Si la nuit a été bonne, le petit déjeuner sera excellent et pris avec appétit et bonne humeur. Le moment de la toilette occasionne déjà quelques complications. Le parcours du combattant ça commence avec la baignoire à enjamber puis ça peut continuer avec les cheveux à sécher bras levés. Et que dire de la pose du vernis sur les ongles des pieds ? C’est carrément un petit exploit. Bref, assurer sa propre hygiène et satisfaire son souci d’esthétique n’est pas simple pour l’insuffisant respiratoire. Ces gestes essentiels et évidents prennent trois fois plus de temps que pour la personne en bonne santé et demandent trois fois plus d’énergie.
Il faudra se réserver une bonne pause après les ¾ d’heure passé dans la salle de bain.
Je vais parler maintenant du ménage.
Parlons d’un geste très quotidien, le fait de faire son lit le matin, qu’est que cela implique ? Tirer les draps, secouer traversin, oreillers, couette, encore une grosse dépense d’énergie. Le jour où je change les draps je ne ferai rien d’autre à la maison car je serai trop épuisée cela peut me prendre jusqu’à plusieurs heures en période de grosse fatigue !
Donc le lendemain de cette journée uniquement consacrée au changement des draps, je ferai une journée « nettoyage des sanitaires à fond », ce que j’essaye au minimum une fois par semaine. Se plier en deux pour récurer la baignoire, lever les bras dans tous les sens et frotter pour nettoyer le carrelage, tout ceci prend rapidement la tournure d’un vrai supplice. Malheureusement impossible pour nous d’utiliser tous les supers géniaux sprays nettoyants, qui font du nettoyage de la salle de bain un jeu d’enfant, car les sprays déclenchent chez nous, immanquablement, des quintes de toux.
Alors, après cette super journée sanitaire, le passage de l’aspirateur et de la serpillière sur le sol sera reporté au lendemain. Cette partie du ménage sera agrémenté de petites pauses forcées et obligatoires, si je veux arriver à aller jusqu’au bout. J’espère cependant que je m’active ainsi, que le téléphone ne sonnera pas, car mon essoufflement est tel, que j’effraierai mon interlocuteur, qui préfèrera raccrocher, comprenant qu’il tombe mal. Pour limiter au maximum ces séances d’aspirateur et de serpillière en fréquence et en durée, j’ai une petite astuce que j’ai piqué à ma mère, les patins, que je propose à mes visiteurs. Pour les amis, j’ai prévu des pantoufles, à chacun sa couleur.
Je vous épargne le récit détaillé de l’épreuve de l’entretien des placards, des portes, des vitres, de la cuisine, de la hotte aspirante. Mais parlons quand même un petit peu du repassage, parce que c’est l’exemple type de l’activité fatigante, que tout le monde fait sans y penser. Cela oblige à rester debout au minimun heure, légèrement penché au dessus de la planche à repasser, les bras tendus, pour tendre le vêtement, le disposer et faire glisser le fer qui est plus ou moins lourd. Là aussi je ne réussis à terminer ma corvée qu’en m’accordant plusieurs pauses.
Je ne parlerai pas non plus, de l’entretien du jardin, de la terrasse, de la pelouse, des plantations qui sont des activités de grands sportifs, que l’on accomplit tant bien que mal, pour pouvoir contempler ses fleurs et se reposer sur une chaise longue au milieu d’un gazon bien tondu, repos bien mérité après tous ces efforts harassants.
Autre point important de la vie quotidienne, l’alimentation et les repas. Qui dit repas, dit courses, il faut songer à remplir les placards et le frigo. Vous pensez que cela ne doit pas être difficile pour nous puisque nous pouvons nous déplacer sur nos deux jambes et nous servir de nos bras pour porter des sacs mais lorsqu’on manque d’air, rien n’est simple. Là aussi, j’ai mes trucs, je préfère les superettes aux grandes surfaces, on y marche moins.
Déambuler entre les rayons et porter du poids me font dépenser énormément d’énergie. Et petite remarque, savez-vous que nous manipulons 7 fois la même boîte de conserve, du rayonnage à notre placard, étonnant, non ?
Arrivée à ma voiture, je suis aussi essoufflée qu’après un petit footing (comme je l’étais lorsque je pouvais encore faire un footing quotidien).
Quand je fais les courses au supermarché, c’est la voiture qui est contente, ça lui permet de sortir un peu elle aussi. Difficile de faire beaucoup de route lorsqu’on est insuffisant respiratoire, même conduire est fatiguant. Certains magasins livrent à domicile, mais j’hésite à rentrer dans ce système, tout d’abord pour ne pas subir la majoration de 20 % sur la facture pour service rendu et aussi pour retarder au maximum un isolement fatal.
Il va de soi qu’un insuffisant respiratoire sensé et raisonnable va au moins trois fois par semaine chez son kiné comme le lui a conseillé son pneumo favori !
Tous ces faits et gestes peuvent vous paraître anodins mais ils sont en fait très fatigants et depuis 3 ans, je les ai fait souvent sous oxygène, relié à une cuve que j’ai baptisé « Médor ».
Lorsque l’insuffisant respiratoire peut faire tous ces actes de la vie quotidienne, à son rythme mais à peu près régulièrement, c’est qu’il se porte « bien », selon sa norme à lui.
Mais là où cette fragile norme en prend un coup, c’est lorsque l’insuffisant respiratoire ne peut plus quitter son lit, lorsqu’il se porte moins bien, parce qu’il a la grippe ou qu’il a pris froid. Alors comment fera-t-il ? Et bien je vais vous le dire, les premiers jours, les seuls efforts de la journée seront faits pour se laver,
un peu.
Enfin, si cela dure trop, le malade se décidera à demander à sa famille, à ses amis, de l’aide pour accomplir ces gestes essentiels. Bien sur, ils répondront présents comme toujours, l’aideront à se laver des pieds à la tête à sa demande, dans ces moments là, on en oubliera toute pudeur. Avec amour et patience, ils lui prépareront un petit repas alors qu’il n’a pas faim du tout et que même l’action de
l’épuise.
Le handicap respiratoire c’est une souffrance à la fois physique et morale.
Souffrance physique, c’est une souffrance quotidienne, chaque mouvement est contrôlé pour économiser ce souffle si court, et demande deux fois plus de temps que la normale.
Souffrance morale, j’ai admis assez facilement ces drôles de lunettes à oxygène sous le NEZ Le plus dur a été d’accepter que je n’étais plus la jeune femme sportive et dynamique d’avant, le plus dur a été d’accepter de me considérer comme une personne handicapée et qui le serait pour le restant de sa vie, et que je ne pouvais rien faire d’autre que m’adapter à ces nouvelles conditions de vie.
L’association m’a énormément aidé pendant ces moments de doute et m’a permis au sein du groupe, de maintenir une vie sociale. Le dynamisme de ces membres a été pour moi un exemple.
Vous pensez peut-être que je noircis le tableau, ou que je m’apitoie sur mon sort, détrompez-vous, ce n’est qu’un simple aperçu de nos difficultés bien réelles.
Mais tant que je saurai regarder autour de moi, tant que je m’intéresserai aux autres, je resterai convaincue que la vie vaut la peine d’être vécue. Pour terminer, je tiens à vous dire que j’accepte ma nouvelle vie, que je profite de chaque instant et que je suis sereine. »
Yolande, demeurant à Salon de Provence